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Le fédéralisme coopératif au service des citoyens 

14 avril 2018

Jean-Marc Fournier Leader parlementaire du gouvernement et ministre responsable des Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne.

Projet de loi fédéral C-69 sur l’évaluation d’impacts environnementaux

Les citoyens sont en droit de s’attendre à ce que leurs gouvernements, démocratiquement élus, collaborent pour appliquer leurs lois respectives, dans l’intérêt commun et celui de notre avenir collectif.

Le 8 février dernier, le gouvernement fédéral déposait le projet de loi C-69 dans l’objectif d’améliorer son processus d’évaluation environnementale.

Rappelons que le gouvernement du Québec a modernisé sa Loi sur la qualité de l’environnement il y a un an. Nous nous sommes dotés d’un régime d’autorisation clair, prévisible, optimisé et conforme aux plus hauts standards en matière de protection de l’environnement. Pour favoriser l’acceptabilité des projets, il est en effet de première importance que les processus soient clairs et connus dès l’étape de leur élaboration, avant même le moment de leur présentation. De plus, l’assujettissement d’un projet à l’évaluation environnementale provinciale et fédérale doit aussi être clair : il ne peut pas dépendre uniquement du gouvernement fédéral ou du promoteur.

Il est aussi incontestable que les gouvernements doivent collaborer dans l’analyse des projets qui concernent plus d’une juridiction canadienne. La nouvelle loi québécoise prévoit d’ailleurs la mise en œuvre de mécanismes de collaboration afin de coordonner, lorsque nécessaire, les procédures d’évaluation environnementale, y compris par l’établissement d’une procédure unifiée – selon le principe « un projet, une évaluation » – qui évite les dédoublements. Déjà en 2004, le Québec et le gouvernement fédéral concluaient une entente de collaboration, renouvelée en 2010, qui prévoit la réalisation d’évaluations environnementales coopératives selon un processus coordonné, de façon à permettre le respect des lois québécoise et fédérale. Malheureusement, le recours au travail conjoint est plutôt aléatoire et certains promoteurs croient, à tort, que les lois d’une seule juridiction s’appliquent.

Aucun projet situé en partie ou entièrement sur le territoire d’une province ne devrait échapper aux lois environnementales adoptées par le Parlement de cette province. L’aménagement d’un aérodrome, l’agrandissement d’une zone portuaire ou encore la réalisation d’un projet de pipeline sont des exemples de projets qui concernent tant le gouvernement provincial que le gouvernement fédéral : ils doivent faire l’objet d’une procédure unifiée pour réduire les délais, assurer le respect des lois des deux ordres de gouvernement et obtenir leur approbation de façon à favoriser leur acceptabilité sociale.

Le fédéral doit s’engager à travailler avec les provinces concernées à la mise en œuvre de ce type de projets. Le projet de loi fédéral C-69 doit prévoir explicitement que les promoteurs ne sont pas dispensés d’obtenir les autorisations nécessaires en vertu des lois provinciales. Les promoteurs doivent savoir que c’est ainsi que seront étudiés leurs projets. Les affirmations récentes de représentants fédéraux au sujet du pipeline Trans Mountain évoquant une application exclusive des règles fédérales ne servent pas le règlement de ce dossier et elles sont inquiétantes pour l’avenir. En outre, elles encouragent les promoteurs à ignorer les règles environnementales provinciales décrétées au nom des citoyens intéressés ou touchés par la réalisation des projets. L’acceptabilité n’en sera sûrement pas favorisée.

Lorsqu’un projet relevant de la compétence législative du Parlement fédéral se réalise en territoire provincial, il est clair que les lois et les règles édictées par les deux gouvernements doivent trouver application, sans que les processus se dédoublent pour autant.

On peut bien sûr justifier une telle exigence par celle du fédéralisme coopératif agissant pour le bénéfice des contribuables, qui sont en droit de s’attendre à ce que les deux ordres de gouvernement travaillent ensemble de la manière la plus efficace possible. On peut aussi, et surtout, la justifier comme prérequis à l’acceptabilité sociale, dont le premier ministre Trudeau a lui-même déjà affirmé l’importance.

Or, comment peut-on espérer voir naître l’acceptabilité si, dès le départ, une communauté n’a pas la garantie que les lois dûment adoptées par le Parlement provincial qu’elle a élu, incluant les lois sur la protection de l’environnement et celles sur l’aménagement du territoire, seront appliquées?  

Une solution imposée par le gouvernement fédéral ne peut pas régler la situation. Le fédéral doit plutôt collaborer avec les gouvernements des provinces concernées et convenir d’un processus d’évaluation conjoint qui assure le respect des compétences de chacun, et donc des choix démocratiques de tous les Canadiens. Un véritable fédéralisme coopératif au service des citoyens n’exige rien de moins.